mardi 29 juillet 2008

Discours inaugural Petit Goave (partie 1)

Discours du Ministre de la Santé Publique et de la Population
Dr Josette BIJOU
A l’occasion de l’inauguration des locaux rénovés de
L’hôpital Notre Dame de Petit Goâve
Le 28 avril 2006-06-24


Mesdames Messieurs,

L’évènement qui nous rassemble ce matin revêt pour moi une signification toute particulière, il n’est nullement question d’une simple inauguration de quelques pavillons de l’hôpital Notre Dame de Petit Goâve, une institution vieille de plusieurs décennies. Le sens est beaucoup plus profond. Il s’agit pour nous de faire un halte et de prendre le temps de déguster et d’apprécier les fruits de la paix.

En effet, je garde encore à la mémoire cette journée du samedi 23 octobre 2004 quand sur l’invitation d’un grand ami, dont je salue la présence dans cette salle, le révérend père Miguel Auguste, j’ai accepté de braver les rumeurs pour me rendre à Petit Goâve et ceci en dépit d’une situation politique lors un peu confuse.

En ma qualité de Ministre de la santé, j’ai débuté ma visite à l’hôpital ; où à la pédiatrie, j’ai trouvé un bébé hospitalisé et sa mère qui me parla en ces termes « mwen sot oblije prye yon mis poul vinn mete seròm nan pou mwen pou timoun nan »

Plus loin, à la maternité j’ai trouvé une infirmière, elle m’a dit : si une patiente arrive maintenant, je ne saurai quoi faire, car je n’ai même pas une paire de gants stériles pour faire un accouchement.

A la résidence des médecins un gynécologue que j’ai rencontré m’a déclaré qu’il serait vraiment embarrassé si une section césarienne s’impose à l’instant, car l’hôpital ne dispose même pas d’un plateau stérile.

Signalons en passant qu’à l’époque l’hôpital n’avait ni directeur médical ni administrateur. C’était la désolation et la confusion totale.

Après la visite de l’hôpital, je me suis rendue tour à tour au lycée Faustin Soulouque où j’ai eu un entretien avec les dirigeants et un groupe d’élèves, puis au commissariat de la ville où je me suis entretenue avec un groupe de militaires démobilisés, pour terminer ma tournée dans une boite de nuit, où j’ai tenu une réunion très houleuse avec le groupe des jeunes militants révolutionnaires. Ce fut l’occasion pour moi d’écouter leurs doléances justes et bien fondées et de leur présenter la politique du Gouvernement de transition qui n’entendait nullement exclure un groupe d’haïtiens mais qui avait plutôt de sérieuses difficultés financières qui risquent de s’aggraver si le désordre et les manifestations violentes doivent se poursuivre dans le pays. Notons qu’à Port au Prince nous étions en pleine opération bagdad.

A la fin de la rencontre c’était comme la signature d’un pacte où le groupe des militants révolutionnaires s’engage à rétablir la paix, à restituer les véhicules séquestrés, à rouvrir dès lundi matin les bureaux de l’administration publique fermés depuis plusieurs semaines et à libérer les voies d’accès conduisant dans le Sud du pays. De notre côté tout devrait être mis en branle pour engager un dialogue franc et sincère en vue d’améliorer les conditions de vie de la population de Petit Goâve. Un délai de quinze jours jusqu’au 7 novembre nous était accordé pour montrer des actions concrètes.

Suite à ces rencontres, nous avions pu conclure que nous étions en présence d’une population de jeunes et d’adultes frustrés, qui se sentent exclus, méprisés et qui utilisent toutes sortes de violences pour se faire entendre.

Comme promis six jours plus tard une équipe technique du Ministère de la Santé a été déléguée sur place pour étudier avec les jeunes les différentes interventions possibles bien entendu celles relevant du domaine de la santé publique tout en considérant la santé comme étant le moteur du développement.

Huit jours plus tard nous avons identifié et transféré un directeur médical et un administrateur et certaines nominations essentielles furent effectuées en vue de permettre la reprise des activités à l’hôpital. En même temps nous avons multiplié les contacts à Port au Prince en vue de mobiliser les ressources. Plusieurs institutions telles la FOSREF, l’UNFPA, l’OPS/OMS, la SEJSSC nous ont soutenu dans cette initiative.

Du coté des jeunes militants révolutionnaires, les différents engagements pris furent respectés. Symboliquement un jeune m’a apporté à mon bureau à Port au Prince les clefs d’un véhicule du Ministère de l’Environnement qui avait été séquestré, ceci sans aucune gratification financière. Même certaines armes à feu ont été remises.

A partir de cette date dans le domaine de la santé, les interventions se sont multipliées par le MSPP, la FOSREF, l’OPS/OMS, l’UNFPA, finalement le PL 480 sous un financement japonais et le projet MSPP/BID. Ce sont ces efforts conjugués qui nous ont valu la fête d’aujourd’hui. Nous aurons tour à tour à inaugurer :

· Le nouveau bloc opératoire, une extension de la clinique externe et du laboratoire financés par l’OPS/OMS,

· Le nouveau service d’urgence et la résidence du personnel financés par la coopération japonaise à travers le PL 480.

· D’autres travaux tels la sécurisation des bâtiments, le drainage, le système d’alimentation en eau et l’électrification ont été financés par le MSPP à partir des fonds de la BID.

Ce n’est que la première phase des travaux. Les études sont déjà réalisées pour la réhabilitation de la maternité et de la pédiatrie à partir du projet MSPP/BID. Et l’installation d’une banque de sang financé par les fonds du Gouvernement américain.

Ce fut un chemin tortueux avec des hauts et des bas, compte tenu du manque de moyens financiers de notre côté. La population est restée solidaire, ses relations avec le Ministère de la Santé et ses partenaires se sont améliorées jour après jour pour nous conduire à cette grande victoire que nous célébrons aujourd’hui.

Mesdames Messieurs,

Dans ce contexte, nous ne pouvons passer sous silence la générosité du père Miguel Auguste qui dans le but de faire avancer les actions a accepté de mettre à la disposition du MSPP pour une période de dix années sans rémunération, un local pour faire fonctionner une maison des jeunes, projet identifié par les jeunes eux-mêmes avec notre comité technique. Ce projet en cours d’exécution, nous espérons l’achever avant le départ du Gouvernement de transition.

Chers amis,

Par cette fête, nous voulons envoyer un message clair au monde entier, que l’haïtien est un peuple pacifique, mais qui aujourd’hui comme hier entend lutter contre l’exclusion, qui aujourd’hui comme hier veut participer à la construction de son pays. C’est l’essentiel des leçons que nous avons tiré de cette expérience qui nous a grandi socialement et politiquement. Aussi le ministère de la Santé Publique et de la population s’enorgueillit d’avoir contribué si activement au rétablissement de la paix dans une ville connue pour sa turbulence. Nous saisissons donc l’occasion pour féliciter la population de Petit Goâve, les jeunes en particulier et les encourager à progresser dans le sens de la construction d’une société d’amour pour une paix durable qui est la voie unique qui conduit au développement. Nous félicitons également tout le personnel de santé, d’une façon spéciale le directeur département le Dr Guirlaine Raymond et le directeur médical de l’hôpital Notre Dame le Dr Roussel Toussaint qui ont su faire preuve de beaucoup d’abnégation dans la gestion d’un dossier qui s’était révélé si difficile au début. Nous vous demandons de les applaudir s’il vous plait.

Maintenant c’est le moment pour nous de dire merci à tous ceux qui ont contribué à rendre possible la fête d’aujourd’hui. Pour cela, nous regrettons grandement l’absence du chargé d’affaires du Japon et nous demandons au directeur du PL 480 de se faire l’ambassadeur du MSPP pour transmettre au Chargé d’affaire cette plaque honneur et mérite pour la contribution de son pays au développement de la santé publique en Haïti. Par ce geste nous disons merci au gouvernement et au peuple japonais non seulement pour la population de Petit Goâve mais aussi au nom de tous les enfants d’Haïti qui bénéficient de la générosité du Japon à travers le programme de vaccination dont le Japon finance chaque année à hauteur de 2 millions de dollars américain.

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